Théâtre/Spectacle « Sweet Amalia »: Quand la gloire et l’amour ne font pas bon ménage
C’est sous une paillote de l’Institut Français de Cotonou noire de monde que s’est déroulé dans la soirée du samedi 15 octobre 2022, le spectacle de théâtre « Sweet Amalia » . Texte de Pierre Kostel, mise en scène par Carole Lokossou et interprété par le comédien Casimir Agbla alias Dom dom, « Sweet Amalia » est une pièce qui touche l’actualité de beaucoup d’artistes qui voient leur vie de gloire et de succès s’écrouler du jour au lendemain tel un château de carte. Plusieurs raisons sous-tendent certainement cet état de chose. Mais dans le cas de la pièce « Sweet Amalia » , les amoureux du théâtre ont avec émotion vécu une histoire pleine de suspense et de rebondissements.
Rage, amertume, regrets, détresse, déception, chagrin… Ainsi se résument les émotions qui pouvaient se lire dans les yeux de Arnold Arnold interprété par Dom dom. Sur une scène sobre, faite d’une table incrustée de miroir, d’une chaise et d’un rideau noir dans le fond de la scène, Dom dom déroule la vie d’Arnold Arnold qui dans un passé récent, était au sommet de sa gloire. Il avait eu la chance de jouer sur scène les rôles les plus prestigieux. Dieu, papa Lègba ou encore Nelson Mandela, Arnold a eu le privilège de les interpréter avec le plus grand succès.
Mais à présent, sa vie se retrouve pas au pied, mais carrément sous une pyramide dont le sommet et les segments sont désormais instables et impossibles à réajuster. Mais l’effet de la gloire connu par Arnold étant toujours d’actualité, ce dernier se voit confier à nouveau, après cinq ans d’absence sur la scène, un rôle de femme, Bérénice. Une expérience qui va réveiller les vieux démons d’Arnold qu’il essayait tant bien que mal d’endormir en s’isolant du monde et en se noyant dans l’alcool.
Face à ce miroir aussi instable que la vie d’Arnold, ce dernier malgré toute sa volonté ne parvient pas à s’approprier ce rôle de Bérénice, une femme qui souffre d’être mal aimée; une femme répudiée à cause d’un amour visiblement impossible. Face à ce miroir Arnold au lieu d’y retrouver son reflet, y revit plutôt une étape de sa vie semblable à celle de Bérénice. Une étape de sa vie qui l’a conduit à sa chute. Cette étape où il vivait un parfait amour avec Amalia, sa « Sweet Amalia », qui sans aucune raison lui a tourné dos, le laissant seul, sombré dans la pente de la gloire, dans le déplaisir et dans l’ombre.
L’on comprend donc aisément les raisons de la chute d’Arnold. Un amour mal vécu, un amour illusionniste, un amour non vécu qui malgré les années, le rattrape et l’empêche de reprendre avec sa passion. Sous des aires musicales enchantées, où Dom dom interprète Arnold dans une cadence rythmique. Ce dernier hanté par l’amour d’Amalia et souffrant de l’absence de cette dernière, se retrouve incapable de jouer convenablement le rôle de femme à lui confié. Il demeure malgré tout à l’épreuve d’Amalia. Sa tête à beau fait l’effort de se détacher d’Amalia mais son cœur reste scotché à sa « Sweet Amalia ».
La sobriété de la scène adoptée par la metteur en scène, Carole Lokossou donne l’impression de répondre à la recherche de l’équilibre adéquate entre un texte aussi fort et pleine d’émotions et son environnement d’interprétation. Quant aux mélodies rythmiques de la batterie qui accompagne le comédien sur scène, elles démontrent la rage et la déception qui remplissent le cœur du comédien.
L’histoire de cette pièce de théâtre pourrait ressembler à celle de beaucoup d’artistes de nos jours, qui tout comme Arnold pour diverses raisons, sombrent dans l’oublie et dans la chute après un parcours de gloire. Le constat est remarquable et retentissant puisque certains de nos artistes parfois sans accompagnement psychologique ou tout autres se voient obliger de lancer des S.O.S qui parfois aboutissent et parfois pas.
Pour Carole Lokossou, metteur en scène de cette pièce de théâtre, c’est une histoire qui l’interpelle et qui l’oblige à se pencher sur la question de la gestion de la vie un artiste au delà de ses moments de gloire. C’est une histoire qui a retenue son attention, elle même étant une actrice qui se fait remarquer par son immense talent, son dévouement et son engagement pour le travail bien fait. Raison pour laquelle elle n’a pas hésité à mettre son savoir faire au service de Dom dom qui lui en a fait la demande.
Et que dire du jeu d’acteur de Dom dom qui interprète Arnold ? La perfection n’est pas de ce monde comme on a l’habitude de le dire, sinon on pouvait dire qu’il a joué son rôle à la perfection. Nous avions l’habitude de voir Dom dom dans des rôles calme et sans « grand bruit ». Pour ce qui est de « Sweet Amalia » , Dom dom a transcendé les barrières qu’on lui connaissait. Être à la fois Arnold le soulard, Arnold l’amoureux, Arnold le mal aimé, Arnold le déçu et en même temps se prêter au rôle de Bérénice dans un accoutrements et une voix de femme. C’est à ce jeu que s’est prêté Dom dom. Un jeu d’acteur qui a captivé l’attention et l’admiration du public qui n’a pas manqué de l’affirmer dans les échanges, au terme d’un tonnerre d’applaudissements à la fin de la représentation.
Il faut rappeler que la réalisation de cette pièce est faite grâce à l’appui financier de l’Institut Français dans le cadre de son appel à projet d’aide à création. « Sweet Amalia » entame ainsi une tournée et sera en représentation le mercredi 19 octobre à l’espace Mayton à Calavi et à l’Institut Français de Parakou la samedi 22 octobre 2022.
Bérénice Célia Gainsi
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