Cinéma : ‘’Dahomey’’, Ours d’or à la Berlinale 2024 : Le public béninois sur les traces du rapatriement de 26 trésors royaux volés à leurs ancêtres
Au lendemain de la projection en avant-première du film ‘’Dahomey’’ à Canal Olympia de Cotonou, Mati Diop, réalisatrice de ce film a tenu une conférence de presse à Wegal Space dans la matinée du vendredi 31 mai 2024. Ce moment d’échange avec la presse béninoise et internationale a été l’occasion pour la réalisatrice franco-sénégalaise et son équipe, d’aborder différents thèmes centraux du film ‘’Dahomey’’. Aussi, cette rencontre avec la presse qui s’est déroulée en présence des autorités à divers niveaux du secteur culturel béninois, à permis à l’assistance, de discuter entre autres des aspects créatif, historique, culturel et politique de ce chef-d’œuvre qui a remporté le prix de l’Ours d’or à la ‘’Berlinale 2024’’.
Ce film documentaire, traite de la restitution des œuvres d’arts pillés pendant la colonisation, en particulier, les 26 trésors royaux restitués par la France au Bénin en novembre 2021. ‘’Dahomey’’, est un film qui s’empare de ce chapitre historique de la culture et de l’histoire du Dahomey, actuel Bénin. Il suit le parcours du retour de ces trésors royaux, depuis leur démontage au musée du quai Branly en France, jusqu’à leur exposition au public béninois, à la Présidence de la République du Bénin. Ce film, combine des séquences documentaire avec des éléments de débat qui explorent les implications de cette restitution sur les plans historique, culturel et politique. Lesdits débats qui se sont tenus principalement à l’université d’Abomey-Calavi ont soutenu le traitement innovant de ce film qui, dans sa démarche, aborde des questions complexe de manière nuancée et profonde.
A la conférence de presse qui s’est tenue après la projection du film ‘’Dahomey’’ en avant-première, Mati Diop entouré de deux membres de son équipage que sont Didier Nassègandé, comédien metteur en scène et Gildas Adannou, cinéaste, a expliqué que le film ‘’Dahomey’’ explore les enjeux de la restitution des œuvres d’arts africaines pillées pendant la colonisation. Elle a souligné l’importance de la restitution pour la justice historique et culturelle, évoquant la restitution par la France des trésors royaux du Bénin en 2021, comme une source d’inspiration majeure pour ce film. « Je ne m’imaginais pas de mon vivant assisté à un rapatriement d’objets volés. J’ai reçu comme un choc et j’ai eu l’intuition qu’il ne fallait pas manquer ce moment historique. C’est une histoire à coté de laquelle je ne pouvais pas passer. Je me suis sentie impliquée » affirme la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop. Pour cette dernière, très ancrée dans sa démarche « Le voyage qui a eu lieu entre Paris et Cotonou en 2021 pour ces trésors royaux n’est pas une restitution mais plutôt un »rapatriement » ».
Aussi, la réalisatrice a expliqué son choix d’utiliser une approche documentaire mêlée à des éléments de fiction, du faite que cette méthode permettait de créer une œuvre riche en émotions tout en abordant des questions complexes de manière accessible. A travers ‘’Dahomey’’, Mati Diop donne la parole à la jeunesse béninoise afin qu’elle s’exprime sur le sujet de cette restitution d’objets volés à leurs ancêtres, à son histoire. Ces échanges entre les jeunes constituent dans ce film, des séquences vivantes et qui accrochent. Pour Mati Diop, il n’était pas question de faire ce film sans prendre le pouls de la jeunesse sur le sujet. « Cette jeunesse n’a pas eu la chance de connaitre, ni de vivre cette époque de l’histoire de son peuple. Faire parler la jeunesse autour de la question de ce rapatriement est essentiel parce qu’elle constitue une partie importante de la population ». Abondant dans le même sens que la réalisatrice, Gildas Adannou, cinéaste béninois ayant animé ces échanges à l’université d’Abomey-Calavi affirme que « …Donner la parole à la jeunesse vient à point nommé car cette dernière se veut de prendre en main son histoire ainsi que sa responsabilité… ».
Comme on peut le constater dans les propos de Mati Diop, ce film tourné entre la France et le Bénin et dont l’aventure a duré deux ans, est une façon de garder des traces de notre histoire afin de pouvoir la raconter au présent pour nous-même et par nous-même. Et au comédien et metteur en scène Didier Nassègandé de renchérir: « L’acte de la restitution est la matérialisation du cordon ombilical. C’est une nécessité d’aujourd’hui pour demain. Il y a une sorte de renaissance à travers cette restitution ou rapatriement. C’est un appel à se reconnecter à notre histoire. » affirme-t-il.
Cette conférence de presse était une nouvelle occasion pour Mati Diop, d’évoquer une fois de plus, comment travailler sur ‘’Dahomey’’ a été une expérience personnelle profonde pour elle. Elle la connecte davantage à ses propres racines africaines et à l’histoire de son peuple.
Le film ‘’Dahomey’’ après sa projection en avant-première, a fait l’objet d’une sortie officielle en salle à Canal Olympia à Cotonou. Aussi, il est prévu des projections exceptionnelles suivies de débats dans différentes villes du pays. Il faut d’ailleurs notifier que la réalisatrice Mati Diop, ambitionne d’amener le film vers la population afin qu’elle puisse vivre et se réconcilier avec son histoire en générale, et celle des trésors royaux rapatriés en particulier.
Bérénice Célia GAINSI
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