« Le Trône de Béhanzin »: une fresque historique sublimée par la scène béninoise
La comédie musicale « Le Trône de Béhanzin » a récemment enflammé la scène culturelle béninoise, transportant le public dans les méandres de l’histoire d’un des plus grands héros de l’Afrique de l’Ouest. Mêlant habilement musique, danse et théâtre, cette œuvre magistrale ressuscite le passé glorieux du Dahomey tout en jetant un regard critique sur les luttes contemporaines pour la préservation de l’identité culturelle africaine.
Dès les premières notes, le spectateur est happé par l’atmosphère envoûtante des percussions traditionnelles, soutenues par des chœurs puissants. Les scènes se succèdent, mêlant émotion et intensité dramatique, pour raconter l’épopée du roi Béhanzin, dernier souverain du Dahomey, qui s’opposa farouchement à l’envahisseur français à la fin du XIXe siècle. Le récit, ponctué de moments de bravoure et de tragédie, prend une dimension épique grâce à une mise en scène audacieuse et des décors somptueux qui recréent l’ambiance des palais d’Abomey.
Le spectacle se distingue par une direction artistique maîtrisée, où chaque détail compte. Les costumes traditionnels, richement ornés, et les chorégraphies d’une précision millimétrée rendent hommage à la culture dahoméenne tout en ajoutant une touche contemporaine. Le choix des musiques, entre compositions originales et réinterprétations de chants traditionnels, est un autre point fort qui ancre la pièce dans une dynamique de modernité respectueuse des traditions.
Mais au-delà de la forme, c’est le fond qui touche le plus. « Le Trône de Béhanzin » ne se contente pas de raconter une histoire ; il questionne notre rapport à la mémoire, à l’héritage et à la résistance face à l’oppression. À travers le personnage de Béhanzin, c’est la voix de toute une génération qui s’élève, celle qui refuse de céder face à la domination culturelle et économique. Le spectacle interpelle également sur la nécessité de préserver notre patrimoine, de ne pas oublier les leçons du passé et de continuer à lutter pour l’indépendance culturelle.
Les acteurs, visiblement habités par leurs rôles, livrent des prestations poignantes. Mention spéciale à l’interprète de Béhanzin, qui parvient à incarner avec brio la dualité d’un roi tiraillé entre son devoir de monarque et son rôle de père. Le personnage de Yèmin, sa sœur et conseillère, ajoute une profondeur supplémentaire à la narration, offrant un point de vue féminin souvent occulté dans les récits historiques.
Malgré quelques longueurs dans la deuxième partie, « Le Trône de Béhanzin » reste une œuvre magistrale, un véritable cri du cœur pour la réappropriation de notre histoire et une célébration de la résistance africaine. Elle rappelle à tous, Béninois et Africains, que notre passé est notre force et que nos ancêtres, comme Béhanzin, continuent de nous inspirer.
À la fin de la représentation, le public, debout, a acclamé les artistes, visiblement émus par cette plongée intense dans une période sombre mais héroïque de l’histoire du Dahomey. « Le Trône de Béhanzin » n’est pas seulement un spectacle, c’est un hommage vibrant et nécessaire à l’un des plus grands rois du Bénin, un rappel que l’art peut être un puissant vecteur de mémoire et de fierté nationale.
Bérénice Célia Gainsi
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